Il n'y a pas de petit génie. Einstein remplumait les équations, Ernie, lui, plume les poulets. Tout est question de relativité.

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Frédéric Lewino et Gwendoline Dos Santos

Le gars Ernie est un génie. L'égal d'un Galilée, d'un Einstein ou d'un Molière. Mais lui, il ne la ramène pas dans les livres d'histoire. Il a choisi une spécialité confidentielle pour exercer son immense talent : le plumage de poulets. C'est tout un art. Vous en doutez ? Tentez l'expérience. En 3,5 secondes, son record, c'est à peine si vous auriez le temps de repérer le croupion. Aujourd'hui, il n'y aurait guère que Bernard Tapie pour plumer aussi vite, mais il s'agit plutôt de pigeons...

Ernie est employé par une boucherie de Fort Atkinson, dans le Wisconsin. Il est né dans ce bled en 1877, et il y mourra après avoir plumé quelques dizaines de milliers de poulets ! C'est son seul vice, hormis approuver les mariages gay. Toutes les nuits, tous les week-ends, il s'entraîne comme un fou. Ses bras sont devenus gros comme des jambonneaux. En 1926, il remporte le championnat du monde de plumage de poule, au Madison Square Garden de New York, avec un temps de 6 secondes. Jusqu'à sa mort, 33 ans plus tard, Ernie ne sera jamais battu, ni par un homme ni par une machine. Une longévité digne de Jeannie Longo ! Ernie atteint le sommet de sa carrière le 19 janvier 1939, lorsqu'il répond au défi de deux challengers. Ce jour-là, sa poule se retrouve nue en 3,5 secondes. Jamais strip-tease n'a été plus expéditif. Depuis, personne n'a réussi à être plus rapide.

1 472 oiseaux déshabillés en 7 heures 45 minutes

Chaque année, Ernie Hausen plume des milliers de poules pour garder la main. L'âge n'a pas de prise de lui, il reste toujours aussi rapide. Cet artiste varie les plaisirs. De temps en temps, il exerce son art les yeux bandés, avec un seul doigt, avec les coudes ou encore avec les mains enfilées dans des moufles. C'est à peine s'il ralentit la cadence. Sa tendre poulette d'épouse l'a toujours encouragé. Parfois même, chuchote-t-on, elle paie de sa personne quand les poules viennent à manquer.

Autre performance à son actif : 1 472 oiseaux déshabillés en 7 heures 45 minutes. Et encore dut-il s'arrêter faute de combattantes. De quoi donner la chair de poule... Quand on lui demande comment il fait pour aller si vite, il explique : "La température de l'eau pour préparer le poulet est très importante, elle doit être de 73 °C." Et de préciser que le poulet doit être tué avec un couteau, et non pas assommé. Sa tombe, dans le cimetière de Fort Atkinson, reste très visitée. De temps à autre, paraît-il, une plume s'en échappe...

Le Point.fr - Publié le 19/01/2012 à 00:04 - Modifié le 19/01/2013 à 01:10